Prise de risque : encadrer le développement de son enfant sans l'étouffer

Prise de risque : encadrer le développement de son enfant sans l'étouffer

Aller seul à l'école à vélo, grimper dans les arbres, chahuter avec ses camarades : les risques aident l'enfant à se construire. Quels sont les bénéfices de la prise de risque chez l'enfant, quels sont les dangers d'un contrôle excessif par les parents ? Découvrez comment encadrer le développement de votre petit sans l'étouffer.

Comprendre la notion de prise de risque chez l'enfant

Dès la naissance, la découverte du monde est intimement liée à la prise de risque. Celle-ci fait partie du développement normal de l'enfant et de l'adolescent. Pourtant, de nombreux adultes, rongés par la peur de l'accident, ont tendance à envisager le pire et à surprotéger leurs petits. Or, les scénarios catastrophes que ne peuvent s'empêcher d'imaginer les parents surviennent très rarement.

D'après les docteures Émilie Beaulieu et Suzanne Beno, coauteures d'une étude de la Société canadienne de pédiatrie (SCP) publiée début 2024, les recherches ont établi que les enfants sont moins susceptibles de se blesser pendant qu'ils se livrent à des activités non structurées que lorsqu'ils pratiquent un sport organisé. Un constat s'appuyant sur des données chiffrées : le taux de blessures subies pour avoir grimpé dans un arbre (195 cas sur 100 000 dossiers) est par exemple 5 à 22 fois plus faible que pour d'autres activités populaires, telles que le football (4 296 cas sur 100 000 dossiers).

Dans un article intitulé « Laissons nos enfants prendre des risques » rédigé par la journaliste spécialiste des questions de l'enfance et de la parentalité Anne Bideault, la rédaction de Pomme d'Api interroge les parents : « Qu'est-ce qui contribue le plus au développement de l'enfant : lui éviter tout risque ou l'autoriser à en prendre ? ». La réponse apportée par le magazine est sans équivoque : « Nous faisons courir de grands risques à nos enfants en voulant leur épargner toute déconvenue, tout désagrément, tout échec. ».

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Les bénéfices de la prise de risque contrôlée

Il est donc important de trouver un équilibre entre protection et liberté pour favoriser un développement sain de l'enfant. En effet, la prise de risque autonome s'accompagne de multiples bienfaits, d'un point de vue aussi bien cognitif qu'émotionnel et social.

La Société canadienne de pédiatrie souligne ses avantages sur la santé des enfants :

  • Une diminution de la sédentarité, grâce à davantage de liberté et de temps passé sans supervision des adultes,
  • Une plus grande capacité de résilience et de résolution des conflits,
  • Une meilleure estime de soi,
  • Une concentration plus importante,
  • Une baisse de l'anxiété via l'expérience de situations qui font peur.

Grâce à la prise de risque à travers le jeu, les enfants testent leurs limites, et découvrent comment évaluer et gérer les risques. « C'est en tombant qu'ils apprennent la vie ! », rappelle la psychologue clinicienne Anne Bacus. De même, offrir plus d'espace à ses enfants permet de laisser libre cours à leur imagination, ce qui stimule leur curiosité et leur créativité.

C'est en tombant que les enfants apprennent la vie !

Jean Epstein, psychosociologue spécialiste de la petite enfance, abonde également en ce sens. Selon lui, un enfant ne joue pas pour apprendre, mais apprend grâce aux différents jeux auxquels il s'adonne. C'est un véritable apprentissage par l'expérience qui s'opère à travers les défis et les petites erreurs du quotidien !

Risques et sécurité : un juste milieu à trouver

Seulement voilà : comment faire pour encourager l'autonomie et accompagner le développement de son enfant, sans l'étouffer, mais tout en le préservant ? Il s'agit de trouver le juste milieu entre risques et sécurité, entre le lâcher-prise absolu et l'interdiction totale.

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En tant que parent, il convient de poser des limites saines, en identifiant les risques acceptables. Pour cela, les adultes endossent une responsabilité cruciale : celle d'écarter les dangers, c'est-à-dire les menaces non détectables par l'enfant. Au contraire, les risques pouvant être perçus, analysés et gérés par l'enfant sont bénéfiques. Journaliste et ancienne co-animatrice de l'émission Les Maternelles, Nathalie Le Breton explique que « quand les parents se positionnent en observateurs des dangers physiques et psychiques, l'enfant peut se développer et se construire ». Néanmoins, « la vigilance parentale n'est pas de la surveillance pénitentiaire », ajoute-t-elle.

Par ailleurs, la balance entre les risques et les bénéfices doit s'effectuer au regard de l'âge de l'enfant et de son stade de développement. En réaction aux nouvelles directives de la Société canadienne de pédiatrie, le pédiatre parisien Jean Lalau-Keraly estime que « l'âge de tous les dangers » se situe entre 2 et 4 ans. Selon lui, « il n'est pas aberrant d'appliquer le principe de précaution absolu chez les petits ».

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Prenons l'exemple d'un jeu où l'enfant s'amuse avec la sensation de hauteur :

  • Un bambin peut monter sur une chaise avant de sauter par terre.
  • Un jeune enfant ira, quant à lui, s'attaquer à l'escalade d'un petit arbre.
  • Un enfant du même âge, davantage confiant en ses habiletés, grimpera dans un arbre plus grand, plusieurs branches au-dessus du sol.

Le fait d'adapter le type de jeu libre aux capacités et à l'âge de l'enfant permet une prise de risque contrôlée.

Le rôle des parents et des éducateurs dans l'encadrement du développement de l'enfant

Les parents comme les professionnels de la petite enfance ont un rôle actif à jouer dans le développement des enfants, notamment en ce qui concerne leur initiation à la prise de risque. Parmi les mesures à adopter pour le bien-être des plus jeunes :

  • Éducation à la prise de risque : enseigner aux plus jeunes à évaluer les risques par eux-mêmes en leur posant des questions pertinentes, et en les incitant à observer et à analyser leur environnement.
  • Communication et écoute : échanger avec les enfants sur leurs peurs et leurs défis personnels.
  • Soutien sans surprotection : encourager l'autonomie et la prise de décision en évitant les interventions inutiles, mais sans compromettre la sécurité pour autant.

Pour conclure, voici un dernier conseil pour les parents : pensez à laisser vos enfants s'ennuyer ! De même, durant un jeu, n'essayez pas de le diriger à tout prix. Essayez plutôt de mettre du matériel à disposition de votre petit sans lui prodiguer d'instructions. Il s'amusera lui-même à trouver que faire avec !

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